La vie de Saint-Germain
Un panneau didactique développant un aspect particulier de l'histoire de Moutier est réalisé chaque année depuis 2014. Ce projet sur la durée est le fruit d'une collaboration avec le Musée du Tour Automatique et d'Histoire de Moutier.
Comment Germain est-il devenu Saint ?
Germain est né dans la ville de Trèves, aux environs de l’an 610. Son père, nommé Optard, est sénateur. La famille est donc aisée et les trois enfants reçoivent une éducation supérieure. Optomard, le fils aîné, a grandi pour occuper une place importante de la cour du Roi Dagobert. Quant à Numérien, le plus jeune membre de la fratrie, il deviendra plus tard évêque de Trèves.
Germain quant à lui suit dès son plus jeune âge l’enseignement de Saint Modoald, le prédécesseur de Numérien. Auprès de lui, il se cultive dans les domaines des belles-lettres et de la doctrine religieuse. Il se révèle être un garçon doué et doté de nombreuses qualités, attirant naturellement les louanges de son précepteur. C’est à dix-sept ans que l’élève se décide à quitter cet enseignement, poussé par la foi à abandonner ses biens et à diriger sa vie vers une existence purement spirituelle.
Il se rend alors à Horemberg dans les Vosges, où il rejoint Saint Arnoul, ancien évêque de Metz ayant quitté sa fonction pour embrasser la vie d’ermite. Quelques années plus tard, en 635, Germain se prouve digne de recevoir la tonsure, symbole marquant le premier degré de la cléricature. Il se rend suite à cela au couvent de Remiremont, dirigé par Saint Romaric. Il s’y plaît tant, qu’il parvient à convaincre son petit frère de le rejoindre. C’est ainsi que Numérien s’engage sur la voie qui le mènera au siège d’évêque.
Quelques années plus tard, en 641, Germain rassemble quelques-un de ses compères et s’en va pour Luxeuil. C’est là que se trouve l’abbaye fondée par Saint Colomban, le moine irlandais responsable de l’évangélisation de nombreuses parties d’Europe. Le lieu est alors dirigé par Saint Walbert, qui se réjouit de voir cette troupe le rejoindre. Ce sera à cet endroit que Germain continuera sa formation religieuse avant d’être finalement envoyé en Grandval.
La basilique de Constantin de Trèves
Le projet se destinant à créer un monastère en Grandval est né des ambitions de deux personnages. Le premier n’est autre que Saint Walbert, abbé de Luxeuil et supérieur de Germain. Son monastère, en raison de son succès, a de la peine à accueillir de nouveaux résidents. Le temps semble donc propice à la création d’un nouvel établissement capable d’abriter ceux qui désirent adopter la vie du couvent.
Le second personnage est Gondoin duc d’Alsace. Son pouvoir s’étend alors jusqu’aux vallées où coulent le Doubs et la Birse, région riche en minerai de fer. Heureux de saisir l’opportunité de faciliter les transports issus de l’industrie du fer vers son pouvoir seigneurial centré dans les Vosges, le duc s’approche de Walbert afin de lui proposer sa collaboration. Après une longue exploration des vallées jurassiennes, les deux hommes se mettent d’accord pour créer un couvent en Grandval, principal gisement sidérurgique régional.
Le couvent est construit dès les environs de 640 par Fridoald, un des derniers compagnons de Saint Colomban. Cependant Walbert désigne Germain de Trèves comme premier abbé de cet établissement monastique. Ses qualités religieuses en font un très bon candidat, mais ce sont aussi ses origines nobles, son expérience administrative et son érudition qui motivent son élection. Ses devoirs sont vastes et concernent autant l’entretien et l’exploitation du sol, que la responsabilité des fidèles locaux.
Car la vallée n’est pas déserte à son arrivée. Il s’y trouve déjà une communauté chrétienne qui en outre exploite les ressources minières. Sans château ni seigneur, le monastère s’installe en tant qu’exercice du pouvoir ducal dans les environs. Cette autorité est acceptée par la population locale grâce à Germain, mais cela changera peu à peu au temps des successeurs de Gondoin.
Représentation de l’assassinat de saint Germain (19e siècle).
En effet, plusieurs dizaines d’années s’écoulent paisiblement au Grandval. Germain et son abbaye s’y sont bien installé alors que le duc Gondoin cède sa place à Boniface, auquel succède Adalric. Ce dernier est un gouverneur belliqueux, désireux de réaffirmer son autorité dans les vallées de la Birse et de la Sorne, dont les richesses minières sont probablement essentielles à la manufacture d’armement.
C’est vers 674 que le duc exige la soumission totale de tous ses sujets jurassiens. Toutefois, les protestations des habitants du Sornegau, région où l’abbaye de Germain est installée, poussent Adalric à engager des mesures militaires qui le mènent dans un premier temps à saccager la région qu’on appelle aujourd’hui la vallée de Delémont. Il ne fait nul doute que la prochaine étape est de marcher sur le Grandval, ce à quoi l’abbé tente de s’opposer. C’est accompagné de son prieur Randoald, et certainement de quelques-un de ses moines, que l’abbé va partir à la rencontre du duc. Ils le trouvent vers Courtételle, dans la basilique Saint-Maurice. Adalric prétend accepter de retirer ses troupes, mais Germain ne le croit pas et le met en garde. Pris de colère, le duc met le feu aux habitations du village, Germain et Randoald restent encore quelques instants dans la basilique saint Maurice.
Le 21 février de l’an 675, Germain et Randoald se font rattraper par une bande de barbares. Ils sont probablement en train de traverser la plaine de la Communance, qui s’étend entre Delémont, Courtételle et Courrendlin. Ils sont alors battus, puis mis à mort.
Dès ce moment, Germain et Randoald sont considérés comme des martyrs et sont donc appelé Saints.
Une dizaine d’années plus tard, le moine Bobolène de Luxeuil est prié par les abbés des monastères voisins de relater la vie et le martyr de saint Germain et de saint Randoald. Ce récit est immédiatement intégré dans les codex vénérant la vie des saints. Cette passion relate deux miracles qui se sont passés après la mort des deux saints.
1ère page du manuscrit de Bobolène
Le premier se produisit durant l’année suivant leur mort : à la veille de Noël, une lumière aveuglante tomba sur le lieu où Germain et Randoald ont été martyrisés. Plus tard encore, un homme soufrant d’une maladie ressemblant à la peste fut guéri grâce à la ceinture du défunt abbé, retrouvée sur les lieux où son propriétaire avait été tué.
D’autres miracles se sont prétendument produits par la suite, si nombreux qu’il semble difficile de les énumérer. Ils indiquent que la vie des saints ne s’arrête pas à leur mort. C’est peut-être la raison pour laquelle Germain et Randoald ont continué de voyager plus d’un millénaire après leur meurtre. Suite à la Réforme protestante, les chanoines de l’abbaye Grandval sont contraints de quitter leur monastère en 1534. Ils emportent avec eux les reliques des deux saints, dont font naturellement partie leurs dépouilles. Il s’ensuit une série de pérégrination les menant tour à tour à Soleure, Courrendlin et finalement Delémont où ils reposent depuis le 15 février 1805.
- /index.php/archives
- /index.php/projet-historique/l-esplanade-de-la-collegiale